Dictionnaire amoureux des fourmis - Nouveautés Octobre 2020
Alain Lenoir Mis à jour 01-Nov-2020
Les derniers Bulletins Intérieurs de la Section Française qui n'étaient pas encore numérisés : Bulletin Intérieur n°9-1988 et Assemblée générale UIEIS - Toulouse, septembre 1981 (merci Vincent Fourcassié)
Chercheurs
et personnes diverses : Pierre Jolivet
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Espèces : Lutte contre le frelon asiatique - Rat-taupe nu - Fourmis invasives (Tetramorium immigrans) -
Livres et docs divers : Guide des abeilles, bourdons, guêpes et fourmis d'Europe - Architectes du monde animal - Fourmi : les secrets de la fourmilière -
Divers : Un nouveau parc animalier près de Pau - Dessin de trophallaxie - Formicophilie - Noyade - Formicage - Fourmis invasives - Poésie sur les fourmis comestibles - La fourmi à l'honneur du festival Salamandre - Tout sur l'anatomie des fourmis (Peeters) - Ant Financial - La cigale et la fourmi du confinement - Biodiversité et pandémies -
Livres : Les aventures de dodomissinga - San-Antonio - Aïyana chasseuse de fourmis -
Photos : Abeilles -
Films : Animaux nettoyeurs, les alliés de la nature -
New York : les fourmis des gazons (ce sont des Tetramorium caespitum, fourmi des pavés ou des trottoirs) sont très nombreuses (2 000 fourmis par habitat) et elles sont de grandes nettoyeuses de tous les déchets alimentaires, soit 250 000 "donuts" par an. Elles sont en compétition avec les rats et donc limitent la prolifération de ces rongeurs. Hélas de nombreux habitants font appel à des opérateurs qui font la lutte chimique.
On y apprend que l'opossum fait de la thanatose : devant un danger il fait le mort et émet une odeur de mort. Par ailleurs, les vautours sont en déclin spectaculaire en Afrique (chasse, empoisonnemement, etc..).
J'ai découvert Alcanivorax borkumensis, bactérie marine non pathogène, mangeuse de pétrole, qui est utilisée en cas de pollution. Elle dégrade les hydrocarbures (comme le benzène, le toluène, le xylène) avec des estérases en CO2 et eau. Et si on regardait ce qui se passe sur la cuticule des fourmis avec ces bactéries ?
Louvet B. (2020). Les rats-taupes nus kidnappent les bébés des autres pour les transformer en “esclaves”. sciencepost.fr, 29 octobre 2020.
" Les rats-taupes nus (Heterocephalus glaber) évoluent en colonies souterraines composées parfois de centaines d’ouvriers. Ce sont les plus grandes colonies connues de mammifères. Quasiment aveugles, la plupart des spécimens sont également stériles, tout comme dans les colonies de fourmis ou d’abeilles. Seule une “reine”, parvenue à assoir sa domination, parvient ainsi à se reproduire, capable de donner naissance à une trentaine de petits par portée. une équipe de biologistes évolutionnistes dirigée par Stan Braude, de l’Université de Washington, a suivi il y a quelques années plusieurs spécimens au Kenya dans le but d’étudier leurs comportements souterrains. Ils ont alors découvert que plus d’une vingtaine de colonies avaient élargi leurs terriers aux colonies voisines. Et, surprise, ils ont également remarqué que treize individus de ces colonies envahies avaient disparu. Quelques mois plus tard, les chercheurs ont finalement retrouvé deux de ces spécimens dans l’une des colonies envahissantes (une observation confirmée par analyse des tissus). Ces deux sujets, très jeunes, avaient été recrutés comme “travailleurs non reproducteurs”, d’après l’équipe dans son article. Un tel comportement d’enlèvement avait déjà été observé chez ces animaux en laboratoire, mais jamais dans la nature."
"T. immigrans est présente essentiellement dans la partie plus méditerranéenne de la zone étudiée, tandis que T. caespitum est présente exclusivement au nord des vallées du Rhône et de la Saône, dans des environnements plus froids et secs. En outre, T. immigrans est largement représentée dans les microhabitats anthropisés (béton, bitume, graviers), alors que T. caespitum est présente essentiellement dans des sols végétalisés et très abondante en dehors des villes. T. immigrans n’est probablement pas une espèce native du sud-est de la France. Bien que la période à laquelle cette espèce aurait été introduite en France ne soit pas connue précisément à l’heure actuelle, nos résultats suggèrent qu’elle n’est pas présente de longue date dans les zones urbaines les plus au nord de sa distribution, à la frontière du territoire de T. caespitum. Ainsi, ces deux espèces coexistent dans une zone de contact visiblement récente, qui constitue un environnement optimal pour étudier d’éventuels processus d’hybridation entre elles. En étudiant l’ADN mitochondrial et nucléaire des individus collectés, nous avons montré l’existence d’une hybridation fréquente dans la zone où ces espèces coexistent, avec de nombreux croisements desquels résulte une progéniture fertile. Cependant, nous n’avons recensé aucun descendant de mâle hybride : seules les reines hybrides semblent produire une progéniture viable, suggérant que les mâles hybrides ne sont pas viables ou sont stériles. Ce résultat pourrait être lié à l’haploïdie des mâles, bien que de futures recherches soient nécessaires pour confirmer cette hypothèse. nous avons détecté chez ces deux espèces un système d’accouplement monogyne et polyandre : chaque colonie descend d’une reine unique accouplée avec un ou plusieurs mâles. De plus, les reines T. caespitum s’accouplent parfois avec quatre mâles différents (contre un ou deux pour les reines de T. immigrans), augmentant donc les probabilités de s’accoupler avec un mâle appartenant à l’autre espèce."
Des mâles plus gros et plus efficaces chez T. immigrans :
Vol nuptial et polyandrie interspécifique chez les deux espèces :
-
Cordonnier, M., B. Kaufman and G. Escarguel (2020) S’accoupler plus souvent,
et avec des mâles d’autres espèces : la clé du succès
d’une invasion biologique chez les fourmis ? theconversation.com
27 octobre 2020.
- Cordonnier, M., A. Bellec, G. Escarguel and B. Kaufmann (2020). Effects of
urbanization–climate interactions on range expansion in the invasive European
pavement ant. Basic and Applied Ecology 44: 46-54. https://doi.org/10.1016/j.baae.2020.02.003.
-
Castracani, C., F. A. Spotti, E. Schifani, D. Giannetti, M. Ghizzoni, D. A.
Grasso and A. Mori (2020). Public Engagement Provides First Insights on Po Plain
Ant Communities and Reveals the Ubiquity of the Cryptic Species Tetramorium
immigrans (Hymenoptera, Formicidae). Insects 11: 678.
J'avais déjà un peu travaillé sur le microbiome des Camponotus où des bactéries symbiotiques jouent sur la production des hydrocarbures. Un traitement antibiotique induit la production de plus d’hydrocarbures cuticulaires et une cuticule plus mélanisée, mais le profil ne semble pas changé (de Souza et al 2011). Un traitement antibiotique induit un état de stress qui se traduit par une augmentation d'hydrocarbures cuticulaires chez Aphaenogaster senilis, mais pas chez A. iberica (Lenoir et Devers 2018).
"«
Les fourmis ouvrières ont évolué à partir d'insectes
volants, précise le professeur Evan Economo, directeur de l'unité
Biodiversité et biocomplexité à l'OIST. Nous avons toujours
supposé que la perte du vol avait participé à optimiser
leur corps pour le travail au sol, mais nous avons beaucoup à apprendre
sur la façon dont cet échange a eu lieu. » Bien que de nombreuses
études aient été menées sur l'exosquelette des fourmis,
les données sur ce qu'il se passe à l'intérieur sont maigres.
À l'aide de la radiographie et de la modélisation 3D, le groupe
de recherche multidisciplinaire a pu capturer et analyser en détail les
muscles et la structure interne de leur thorax.
Leurs résultats, publiés dans la revue Frontiers in Zoology, offrent
une confirmation de l'hypothèse de départ, selon laquelle la perte
du vol aurait permis au thorax de se réorganiser pour offrir de meilleures
performances au sol. « Dans le thorax de la fourmi ouvrière, tout
s'intègre magnifiquement à l'intérieur d'un espace minuscule
», s'enthousiasmait feu le professeur Christian Peeters, auteur principal
de l'article et jusqu'à peu professeur de recherche à l'université
de la Sorbonne. « Les trois groupes musculaires ont tous pris du volume,
ce qui donne aux fourmis ouvrières plus de force et de puissance. La
géométrie des muscles du cou, qui soutiennent et déplacent
la tête, a également changé. Et l'arrangement interne des
muscles a été modifié. »"
Un dessin de l'article de Peeters :
Voir aussi vidéo OIST "Ants in Augmented Reality"
"J’aime
les œufs de poules, et parfois de canards.
Pourtant mes préférés sont plus exotiques :
Ceux de fourmis rouges, ceux de fourmis noires.
C’est mon caviar blanc, délire des tropiques. "
- Bates, O. K., S. Ollier and C. Bertelsmeier (2020). Smaller climatic niche shifts in invasive than non-invasive alien ant species. Nature Communications 11(1): 5213. doi: 10.1038/s41467-020-19031-1.
Très
beau livre qui présente pour le grand public tous les aspects de la construction
chez les animaux. Des chapitres courts de 4 pages donnant les principales informations
avec de belles photos. Un beau cadeau de Noël.
Sur les insectes sociaux :
- Les secrets des nids d'abeilles, avec un petit encart "de la ruche au
TGV"
- Dans les (petits) papiers des guêpes
- Des cathédrales de terre avec les termites "Une ville climatisée"
- Une cité sous dôme (fourmis rousses)
- Pour vivre heureux, vivre cachés (termite Reticulitermes flavipes,
fourmis champignonnistes)
- Des hyménoptères aux talents de couturiers (oecophylles)
- Des vies entières dans les arbres (jardins de fourmis, arbres à
fourmis)
Ce livre fait penser à celui de Luc Passera "Formidables fourmis" (2016) de la même collection chez Quae : des chapitres courts avec les idées principales et de belles photos.
Voir aussi Des fourmis adaptent leur comportement pour contourner un risque (AFP 8 oct 2020) et Herzberg dans Le Monde du 14 octobre 2020 (Herzberg, N., Les fourmis siphonnent l'eau)
Solenopsis richteri (fourmi de feu noire)
Interrogé par l'AFP sur l'étude consacrée à Solenopsis richteri, Bernard Werber, le journaliste scientifique et auteur de la saga des fourmis, ne s'est pas dit surpris de ces observations : "Elles sont en permanence en train de tester des choses et d'évoluer". Rappelant que cet hyménoptère compte pas moins de 12.000 espèces, il a souligné que "des tas d'entre elles ont trouvé des solutions différentes à des problèmes différents". Et que les observations à venir "nous surprendront toujours".
Et aussi Laurent Keller (Le Monde du 14 oct 2020) :
Nouveaux noms de fourmis
trouvés dans le livre
- Fourmi brigande Solenopsis
fugax (p. 91)
- Fourmi des gazons Tetramorium
caespitum (p.88)
- Fourmi écussonnée Crematogaster
scutellaris (p.92)
- Camponote ronge-bois, fourmi charpentière Camponotus ligniperda
(p.98)
- Fourmi brune, Fourmi noire des jardins Lasius
niger (p.99)
- Fourmi jaune Lasius flavus (p.102)
- Fourmi noire des bois Lasius fuliginosus (p.104)
"Des
chercheurs de l'Institut de Recherche sur la Biologie de l'Insecte (IRBI, université
de Tours/CNRS) démontrent qu'il est possible de neutraliser les frelons
asiatiques sans utiliser de produits chimiques qui nuisent à l'environnement,
la biodiversité et la santé humaine.
Le frelon asiatique, appelé «vespa velutina nigrithorax»,
peut être neutralisé en faisant monter sa chaleur corporellepar
les biologistes. Des
chercheurs de l'Université de Tours et du CNRS ont peut-être trouvé
une solution pour neutraliser les frelons asiatiques sans utiliser de produits
chimiques néfastes à l'environnement, la biodiversité et
la santé humaine. Ils se sont inspirés du comportement de défense
des abeilles asiatiques contre les frelons : des dizaines d'abeilles se jettent
sur un frelon, l'entourent et le tuent en faisant monter sa température.
Les chercheurs
de l'Institut de Recherche sur la Biologie de l'Insecte ont montré que
l'utilisation de la vapeur pouvait permettre d'obtenir un effet comparable.
Leur étude publiée le 6 octobre dans la revue PlosOne ouvre la
voie à des tests de prototypes pour mettre au point un dispositif qui
pourrait remplacer les pesticides."
Ruiz-Cristi, I., L. Berville and E. Darrouzet (2020). Characterizing thermal tolerance in the invasive yellow-legged hornet (Vespa velutina nigrithorax): The first step toward a green control method. PLOS ONE 15(10): e0239742. doi: 10.1371/journal.pone.0239742.
ttps://www.cnrs.fr/fr/utiliser-la-vapeur-deau-pour-lutter-contre-les-frelons-asiatiques
Les fourmis en avance technologique en 1996 :
- Le venin de la
fourmi géante Dinoponera quadriceps est utilisé en médecine
traditionnelle au Brésil pour combattre les rhumatismes. Il
contient des polypeptides. Dans cet article on montre leur effet antinflammatoire
et analgésique chez la souris. Voir
venins
Assreuy, A. M., B. Adjafre, É. Sousa, A. Alves,
A. Pires, Y. Quinet and M. Mota (2020). Venom of the giant ant Dinoponera quadriceps
attenuates inflammatory pain in mouse cutaneous wound healing model. Acta Scientiarum.
Biological Sciences 42: e47680. doi: 10.4025/actascibiolsci.v42i1.47680.
- Une redécouverte : Delatte, E. and O. Chabrerie (2007). Dispersion des graines par une espèce de fourmi rousse des bois (Formica polyctena Foerst.) : approche expérimentale en forêt de Compiègne (Picardie, France). Symbioses, NS 20: 65-71. Pdf Voir Fourmis rousses
- Les
fourmis Camponotus ont coévolué avec les bactéries
endosymbiotiques Blochmannia. Elles ont même appris à
contrôler les bactéries par autophagie (Gonçalves et al
2020) (Voir Bactéries)
Gonçalves, W. G., K. M. Fernades, A. P. A. Silva, D. G. Gonçalves,
M. Fiaz and J. E. Serrao (2020). Ultrastructure of the Bacteriocytes in the
Midgut of the Carpenter ant Camponotus rufipes: Endosymbiont Control by Autophagy.
Microscopy and Microanalysis: 1-9. doi: doi:10.1017/S1431927620024484.
- L'apprentissage précoce
précoce existe aussi chez les bourdons. Lors du fourragement les bourdons
adultes choisissent le pollen en fonction de ce qu'ils ont eu comme nourriture
en tant que larves (Ruedenauer et al 2020). On savait que cette expérience
existe chez les fourmis par nos travaux sur l'apprentissage
préimaginal de l'odeur coloniale.
Ruedenauer, F. A., J. Spaethe and S. D. Leonhardt (2015).
How to know which food is good for you: bumblebees use taste to discriminate
between different concentrations of food differing in nutrient content. The
Journal of Experimental Biology 218(14): 2233-2240. doi: 10.1242/jeb.118554.