Alain Lenoir - Qui suis-je ? (1945 - )        

Mis à jour 29-Nov-2024

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« Sage, sage est le monde des fourmis… »
dit le peintre Robert Victorovitch dans Sonietchka, de Ludmila Oulitskaïa (1996)

J'ai fait mes études à l’École Normale Primaire de Grenoble (pour devenir instituteur, on y rentrait interne sur concours à l'issue de la 3ème jusqu'au bac), puis à l’École Normale Supérieure de Saint-Cloud, qui est maintenant à Lyon.
Juste après l’agrégation de Sciences Naturelles que nous avons d'ailleurs passée fin août suite aux grèves de mai 1968, quand je suis arrivé à Tours en septembre 1968, sur un poste d’assistant on ne me demandait pas de faire une thèse comme maintenant, la thèse de 3ème cycle n’existait pas, mais de faire une thèse d’État, l’œuvre de toute une partie de vie, 10 ou 20 ans de recherche (Lenoir 1979). Le professeur Henri Verron m’a dit comme sujet de recherche « Vous mettez deux fourmis dans une boîte de Petri et vous observez ce qui se passe ». Ensuite il ne m’a plus jamais suggéré quoi que ce soit ! Liberté totale. J’aurais très bien pu changer de thème de recherche mais quand on a commencé à observer des fourmis on ne peut plus s’arrêter ! J'ai soutenu ma thèse en 1979 (voir la chanson La fourmication et le pot de thèse). Il y avait P.-P. Grassé comme président de mon jury de thèse, on était allé au restaurant et j'étais mort de trouille alors qu'il dégustait avec plaisir des huîtres.. On ne nous demandait pas de publier vite, on pouvait publier aux Compte Rendus de l’Académie des Sciences où officiait le Professeur Grassé, spécialiste des termites et grand patron tout puissant de la zoologie. Bien sûr il fallait publier en français !

Après l'agrégation en 1968 j'ai été nommé dans un "Laboratoire de Psychophysiologie" à Tours, nouvelle appellation pour enseigner aux étudiants de psychologie de la biologie. A l'époque il n'était pas évident du tout que le mental ait besoin de bases biologiques, surtout quand on était entouré de psychanalystes... J'ai beaucoup aimé les étudiants de psychologie, souvent curieux et actifs. Il fallait arriver à les intéresser. En effet ils n'étaient pas du tout informés qu'après leur bac, le plus souvent littéraire, ils allaient faire de la biologie en fac.. Il fallait toujours trouver un lien entre le cours et de la psycho. En 2019 les étudiants qui arrivent en licence de psycho tombent toujours des nues en découvrant que les cours de statistiques et neurobiologie remplissent une grande partie de l’emploi du temps (Alica Raybaud, Le Monde du 14 novembre 2019). Ensuite j’ai pris le cours magistral de 1ère année en amphi. Je faisais deux cours d’une heure et demi, dont l’un le matin à 8 heures dans la salle de théâtre Thélème (il n’y avait pas de grands amphis pour 300 étudiants à cette époque). En haut de l’amphi il pouvait se passer plein de choses. C’est ainsi que Michel Isingrini me dira longtemps après qu’il cassait la croute en haut de l’amphi, son premier cours à la fac a été le cours de bio.. et finalement il a fait une thèse sur les fourmis. En licence de cette époque (3ème année) on faisait aussi passer un oral à tous les étudiants. Je me méfiais déjà avec les filles et je laissais toujours la porte entrouverte. C’était dans les deux sens, pas uniquement de la part du prof, je me souviens en particulier d’une fille qui m’avait carrément vendu son oral. Il y avait aussi parfois des tensions pour des notes, j’ai eu une seule fois un étudiant qui voulait me casser la gueule, heureusement un de ses copains est intervenu.
Vinciane Despret sur France Inter le 23 janvier 2021 déclare que lorsqu'elle parle des expériences de Harlow sur la privation maternelle chez les singes, ses étudiants à Liège la critiquent en disant que ce sont des expériences choquantes et qu'elle doit les prévenir avant d'en parler. Les idées évoluent, j'ai présenté tout le temps ces expériences à mes étudiants de psychologie sans avoir de réactions choquées...

Je suis resté à Tours au laboratoire de Psychophysiologie jusqu'en 1986 où je suis nommé professeur à Paris13-Villetaneuse. En 1995 je reviens à Tours au DESCO (Département des Sciences du COmportement, qui a succédé au Laboratoire de Psychophysiologie), puis j'intègre l'IRBI (Institut de Recherche sur la Biologie de l'Insecte) où je suis encore comme professeur émérite. D'ailleurs l'IRBI prend comme "photo d'identité" une image de fourmis.. J'ai beaucoup aimé les cours que je faisais en éthologie avec les étudiants de master de bio, d'ailleurs un collègue qui n'aimait pas l'enseignement et considérait qu'il perdait son temps m'a demandé comment je faisais pour passionner les étudiants. je crois que je lui ai simplement répondu "Il faut d'abord les aimer". J'ai aussi lors de ma dernière année de cours en 1985 supprimé mon cours que j'avais mis en ligne. Et, au lieu du cours on discutais. Certains collègues m'ont d'ailleurs dit que j'allais me faire "voler" mes cours. J'étais un peu un précurseur..

Bernadette Darchen a été la première personne à m'initier à la connaisance des insectes sociaux lors d'un stage d'été à la station biologique des Eyzies en juillet 1969. Je me souviens qu'elle nous avait montré les Dolichoderus quadripunctatus dans les petites branches d'un noyer (ou d'un chêne ?). Nous avions assité aux premiers pas de l'homme sur la lune dans un bar aux Eyzies le 20 juillet 1969 avec une vieille télévision en noir et blanc. Elle a organisé en 1974 un stage pour étudiants à Lamto (Côte d'Ivoire) d'inititation à la faune des insectes sociaux de la savane arborée. Plus tard, nous sommes passés en famille voir Bernadette et Roger Darchen à leur maison où nous avons mangé du lama. Les enfants qui avaient une dizaine d'années s'en souviennent encore.

Pour en savoir plus voir "50 ans de fourmis", conférence au colloque de la Section Française de l'Union Internationale pour l'Etude des Insectes Sociaux à Tours, août 2015. Voit liste de publications

Quelques photos et dessins :

En avril 2020 pendant le conditionnement il vaut mieux boire de la bière Budweiser plutôt que la Corona..

       

2017 Colloque Insectes Sociaux à Tours :

      

et un hommage par Xim Cerdá(vidéo)

2012 :    

   Ilheus (Brésil) 2015                

Avant la télé, d'Yvan Pommaux, L'école des loisirs (2002). Un livre que l'on m'a offert pour mon anniversaire en 2015. Il fallait chercher la dédicace..

  

Pot de départ à la retraite de Dominique Fresneau à Villetaneuse (2014)

    

  

2011 thèse de Sarah Groc à Kourou avec Alain Dejean :

Toulouse 2007 :

La retraite 2005 (dessin Camille Gallot-Lavallée) :

Cameroun 1992  

Bangalore 1990 :              

   

Quelques vidéos :       et une autre sur les phtalates

Quelle mouche m'a piqué ? Vidéo de Rémi Rappe (2013) Vidéo entière - extrait

FOURMAG. Le magazine qui vous met des fourmis dans les jambes, par Maëva Guillemain, Zoé Chabanel et Jean Borderie du lycée Vaucanson à Tours (2010). interview d'Alain Lenoir,

Un papy passionné de fourmis selon mes petits-enfants dans les années 2010 (selon Luc Passera : "J’ai bien aimé le petit mot écrit par tes petits-enfants. Consacrer sa vie professionnelle et plus à la vie des fourmis ne signifie pas que nous sommes hors sol. " Mail du 3 décembre 2020).

Papi fourmi par Apolline Capelle (sept 2022)   

Conférence au Burkina Faso en 2004 :

1992 au Japon avec Jacques Pasteels :

30 ans de vie de fourmis selon Karine Lenoir (1986) :

La vengeance des fourmis selon Karine Lenoir (1982) :

Nouvelles recherches
- Tapinoma magnum, nouvelle fourmi invasive dans le sud-ouest. Voir aussi à Saumur avec interview (30 juin 2021) : "Alain Lenoir est professeur émérite à l'Institut de Recherche sur la Biologie des Instectes de Tours. Il est venu constater ce phénomène.
"J'ai été impressionné par la quantité de fourmis, reconnaît-il. Ça fait partie de toutes les espèces invasives qu'on voit partout dans le monde avec les déplacements. Il suffit d'une plante, d'un pot de fleurs avec une reine et quelques ouvrières." Le professeur Lenoir, se veut rassurant, la Tapinoma Magnum n'a pas de venin. Tout au plus elle mordille, ce qui peut-être effectivement désagréable. "Elle se développe avec les hivers doux, ajoute-t-il. A l'intérieur des maisons, il faut essayer de trouver par où elles passent et boucher les trous. Et enlever les nourritures possibles ou mettre la nourriture dans des pots bien étanches."
En Bretagne on se pose des questions, par exemple dans Le Télégramme "avec interview de Jean-Luc Mercier et citation du site web de votre serviteur " (Cudennec-Rio 2022).
Du nouveau sur les fourmis envahissantes en France : Lenoir, A., J.-L. Mercier, E. Perdereau, L. Berville and C. Galkowski (2023). Sur l’expansion des fourmis envahissantes du genre Tapinoma en France (Hymenoptera : Formicidae). Osmia 11: 1-10. https://doi.org/10.47446/OSMIA11.1. Pdf

Citations
- Anne Teyssèdre (1991). Mimétisme chimique. Pour la Science n°169. Pdf  Txt. A. Teyssèdre parle de Michel Isingrini, Alain Lenoir et Pierre Jaisson qui ont montré chez Cataglyphis cursor que l'empreinte olfactive peut commencer dès le stade larvaire (Isingrini et al 1985).

Interviews
- Extrait de "Dans le ventre de leur mère, les bébés requins se massacrent" (ça m'intéresse juillet 1995). Pdf

Etudiants master (DEA à l'époque)
- Ataya Hussein (1977) - Le comportement nécrophorique de la fourmi Lasius niger. DEA Univ. de Rennes, 37p.
- Delalande Christian (1981) - Les stratégies de récolte alimentaire chez les fourmis moissonneuses du genre Messor. DEA Univ. de Rennes, 40p.
- Isingrini Michel (1983) - La reconnaissance coloniale dans les soins au couvain chez la fourmi Cataglyphis cursor. DEA Univ. Paris Nord, 102p.
- Quérard Laurence (1985) - Reproduction et exploitation de l’habitat chez la fourmi Cataglyphis cursor. DEA Univ. Tours, 51p. Voir Lenoir et al 1988 et Lenoir et al 1990.
- Pondicq Nicole (1983) - Étude des territoires chez la fourmi Cataglyphis cursor (Hymenoptera Formicidae). DEA Univ. Tours, 39p. Voir Lenoir et al 1988
- Barbazanges Nicolas (1989) - Reconnaissance interspécifique au sein de l’association Formicoxenus provancheri - Myrmica incompleta (Formicidae, Myrmicinae). DEA Univ. Paris Nord, 25p.
- Anglade Françoise (1989) - Étude du rôle de la fluorescence cuticulaire dans la reconnaissance interindividuelle chez le scorpion Androctonus australis (Buthidae). DEA Univ. Paris Nord, co-direction avec J. Goyffon (MNHN).
- Oliva Lidivina (1990) - Reconnaissance coloniale spécifique chez deux espèces de fourmis Camponotus (Hymenoptera, Formicidae). DEA Univ. Paris Nord, 29p.
- Mercier Jean-Luc (1992) - Structure sociale et utilisation du milieu chez Polyrhachis laboriosa (Hymenoptera : Formicidae). DEA Univ. Paris Nord, 23p.
- Viana Ana Maria (1992) - L’attractivité des larves chez la fourmi Myrmica rubra. Première approche de la mise en évidence de phéromones. DEA Univ. Paris Nord, 23p.
- Quagebeur Mélanie (1996) - Les effets de la privation sociale chez la fourmi Camponotus. DEA Univ. Paris Nord. Voir Boulay et al 1999.
- Cuisset David (1997) – Effets de l’isolement social sur l’odeur coloniale et le comportement des fourmis Camponotus et Aphaenogaster. DEA Univ. Paris Nord, 24p.
Voir Lenoir et al 2001.
- Marsault Delphine (1998) – Adaptation des fourmis Cataglyphis au climat désertique : importance des hydrocarbures cuticulaires. DEA Adaptation et survie en environnements extrêmes. Univ. Lyon I, Aix-Marseille II et St–Etienne, Univ. Tours, 29p. Résumé   Voir Lenoir et al 2009
- Frézard Anne (1998, avec Christine Errard) : Symbiose et odeur coloniale chez la fourmi champignonniste Acromyrmex subterraneus subterraneus (Université Paris 13 et Univ. Tours) Résumé
- Renault Julien (2003) - Différents aspects de la modalité de reproduction chez la fourmi Aphaenogaster senilis Mayr (Hymenoptera, Formicidae Myrmicinae). DIRS Univ. Tours.

Etudiants doctorat
- Michel Isingrini, thèse 1985.
- Françoise Berton, thèse 1989.
- Hussein Ataya, thèse 1980.
- Christian Delalande, thèse 1986.
- Elise Nowbahari, thèse 1988.
- Catherine Vienne, thèse 1993 (co-direction Christine Errard).
- Ana Maria Matoso Viana, thèse 1996.
- Abdallah Dahbi, thèse 1997.
- Jean-Luc Mercier, thèse 1997.
- Raphël Boulay, thèse 1999.
- Virgine Cuvillier-Hot, thèse 2002 (co-direction Christian Peeters).
- Jean-Christophe Lenoir, thèse 2006 (co-direction Jean-Luc Mercier).
- Danival de Souza, thèse 2008.

Postdocs et divers
- Cerdá Xim, Javier Retana, et Xavier Espadaler doctorants à Barcelone, formation à la myrmécologie et au marquage des fourmis (1985-86). Plusieurs semaines.
- Cerdá Xim (Barcelone) : post-doc à Paris 13 de sept. 1991 à déc. 1992 (bourse du gouvernement français). Directeur du CSIC à Séville de 2014 à 2019. Sabbatique à l’IRBI du 1er septembre 2004 au 31 mars 2005.
- Hefetz Abraham (Tel Aviv) : poste rouge CNRS de 6 mois en 1995 (Paris 13) et bourse Région Centre de 4 mois en 2001 (Tours). Professeur invité mai – juin 2004 et juin – juillet 2006
- D’Ettorre Patrizia (Parme) : bourse Marie Curie puis bourse du CNR italien (avec C. Errard), juillet 1998 à mars 2001, puis postdoc à Regensburg (All.), Contrat UE à Copenhague pour 5 ans à partir de juillet 2005. Professeure à Paris 13 au 1er novembre 2009.
- Ichinose Katsuya (Japon) : Chargé de Recherche au ministère de l’agriculture japonais (Okinawa), en congé sabbatique, bourse du gouvernement français (oct. 2001 – déc. 2002).
- Reynolds Hannah (USA) : étudiante graduée Université du Kansas, bourse Fullbright (sept. 2004 – juillet 2005). PhD à l’université de Duke (USA) sur les champignons en 2011.
- Delabie Jacques, Chercheur au CEPLAC (Centro de Pesquisas do Cacau) et Professeur à Universidade Estadual de Santa Cruz (Ilheus-Itabuna Brésil) : octobre à décembre 2006 sur poste invité CNRS à Tours.

Des rencontres et autres contacts
- J'ai été invité à Aurillac aux journées de la science en 2009 pour faire une conférence sur les fourmis. Le vendredi soir Jean-Marie Pelt était l'invité d'honneur. Le soir, au dîner on a beaucoup discuté. On s'est mis à parler de la monogamie chez les oiseaux et je lui ai appris que c'était le plus souvent faux et qu'il y a énormément de petits qui ont un autre père.. Il m'a remercié. Il a eu plus de 400 personnes à sa conférence et moi le lendemain peut-être 50.. Il parait pour les organisateurs que c'était un bon nombre.
- J'ai rencontré E.O. Wilson une seule fois dans son labo dans les années 1980. Il a été très attentif et intéressé par nos travaux sur les hydrocarbures et en particulier sur les Formicoxenus et leur hôte Myrmica. Je l'ai revu ensuite au congrès international à Washington en 2006, il faisait un exposé, mais je n'ai pas osé l'approcher..
- Ross Crozier venait tous les étés en Europe et il est venu à Tours dans les années 80. Chercheur très intelligent et ouvert, intéressé et curieux. Passionné des problèmes d'évolution et en particulier de la reconnaissance de parentèle. On l'a invité à dîner à la maison. Il y avait ma maman qui a été très impressionnée par ce grand chercheur. Hélas il est mort trop jeune en 2009 à 66 ans.
- 1er mars 1945 : « Un bel évènement en France ; Alain a vu le jour alors que le monde était dans la tourmente… il a alors décidé de consacrer sa vie aux fourmis, le monde des hommes étant trop violent…. dit-il dans son premier cri… » (Évelyne Vacherias, 1er mars 2015).
- Mathieu Lihoreau : "Je profite de ce temps pour écrire mon HDR... J'y décris brièvement mon stage de M1 sur Aphaenogaster senilis. Merci encore pour m'avoir mis le pied à l'étrier!" (mail 15 avril 2020).
Dans son livre A quoi pensent les abeilles ?" (2022)
"J’ai découvert la recherche avec mon professeur d’éthologie, sans vraiment me soucier du travail qu’il me proposerait. Il me fallait un stage et une bonne note. Alain Lenoir avait passé sa carrière à étudier la communication chimique chez les fourmis. Avec lui, j’ai donc disséqué des centaines de fourmis et analysé leurs odeurs par des techniques de physique-chimie. Pas de comportement. Ni de chimpanzés. Mais après plusieurs semaines de travail, j’ai pu conclure que les fourmis françaises avaient une odeur différente des fourmis espagnoles, bien qu’elles fussent de la même espèce. Comme je n’avais pas lu la littérature scientifique en détail (ce qu’il faut toujours faire avant d’attaquer une question de recherche), j’ignorais que je n’avais rien découvert de très nouveau : chez la plupart des espèces de fourmis, les membres d’une même colonie ont la même odeur et celle-ci est en partie déterminée par les nombreux gènes qu’elles ont en commun. Par conséquent, des fourmis issues de colonies éloignées géographiquement (par exemple des deux côtés des Pyrénées) le sont également génétiquement et olfactivement. Malgré cette porte ouverte enfoncée, Alain semblait satisfait de mon travail et m’encouragea à continuer dans cette direction. Ce que je fis avec enthousiasme et c’est comme cela que j’en suis venu à me passionner pour la personnalité des blattes, le vote des mouches, la navigation des bourdons, l’apprentissage des abeilles et bien d’autres aspects de la vie intime des insectes que je raconte dans les chapitres de ce livre.
- Christophe Lucas qui a présenté pour la première fois son travail de thèse dans un colloque. Il parait que j'ai dit à la fin de son talk "je ne crois pas à ce que tu as dit", et cela l'a profondément marqué. Il s'en souvenait encore très longtemps après. Comme quoi il faut faire attention à la manière de dire les choses..
- Un merci de Christian Peeters en 2015 :

- Dédicace de Jean-Claude Verhaeghe à la sortie de son livre "Les fourmis de nos régions"

- Dédicace de Bruno Corbara à la sortie de son livre "Les sociétés d'insectes" en 1990 :

- Dans les années 90, je suis allé voir Alfred Buschinger (voir blog) à Darmstadt (Allemagne) pour parler des Formicoxenus. Il m'a reçu chez lui très gentiment. emmené en forêt en chercher dans des nids de fourmis rousses et hélas nous n'avons rien trouvé. C'était la fin de l'hiver. Il était profondément vexé..

- Dans les années 80, le laboratoire de Tours avait une collaboration avec Jacques Pasteels à Bruxelles. Selon Annick Lenoir "Annick m'a rappelé que tu étais venu à Tours (années 75-80?) en relation avec le labo de Verron et qu'on avait fait un tournoi de ping-pong dans notre grange et que tu avais gagné." La réponse de Jacques : "Annick a très bonne mémoire. Ce qu’elle ne dit pas, c’est que j’ai cassé une raquette en tentant de reprendre une balle superbement envoyée par un périphérique (pour moi) de notre groupe dont je ne me rapelle plus le nom. J’ai gardé longtemps la coupe, un coquetier je crois." (mail du 3 janvier 2021). Jacques Pasteels m'a appris à reconnaître les Tapinoma à l'odeur; en effet il suffit de les écraser et elles sentent le beurre rance.

- Boris Cyrulnik, neuropsychiatre très connu, venait au DESS (master) d’éthologie appliquée à Villetaneuse dans les années 90. J’ai été très impressionné par ses idées comme la résilience, à l’époque notion inconnue. Il m’a d’ailleurs proposé d’écrire un chapitre sur les fourmis dans « Si les lions pouvaient parler – Essais sur la condition animale ». (Lenoir 1998).

Quelques citations et divers
J'ai toujours été passionné dans mon travail sur les fourmis. Comme le dit bien Kundera (La lenteur, 1995) : « Les entomologistes sont de curieux mufles : ils négligent la jeune fille bien qu’elle les écoute avec la meilleure volonté du monde, prête à rire quand il le faut ». Cela doit signifier que les entomologistes sont passionnés et parfois en oublient de voir ce qui se passe autour d’eux, même les plus jolies filles. « Nous, les gens de science, sommes privilégiés car faire un travail qui est en même temps une passion, c’est un privilège, oui, mes amis, le privilège que n’ont jamais connu mes compagnons ouvriers du bâtiment, parce qu’il est impossible de porter des poutres avec passion. ». C’est ce que dit un savant tchèque envoyé pour travailler dans le bâtiment pendant 20 ans.
Rémy Chauvin aussi a toujours été passionné. Il explique "Pourquoi consacrer plus de quarante années d'une vie d 'homme de science à un seul sujet, celui des insectes sociaux ? ... quand j'ai entrepris d'étudier les fourmis.. j'aimais ces petits monstres.. ".

"Je suis myrmécologue. C'est comme cela qu'on appelle une biologiste qui s'intéresse aux fourmis. "Etudier les fourmis ??? Et on te paie pour faire ça ?" Telle était la réaction d'une copine que je n'avais pas vue depuis des années. Je suis maintenant habituée à ce que certains de mes amis manifestent une sorte d'incompréhension totale que je ne fasse rien de plus "utile". (Cleo Bertelsmeier, 2019 ; Les guerres secrètes des fourmis, p. 9)
Cela me rapelle Luc Passera qui lors d'un colloque UIEIS à Toulouse en 2007 disait à peu près la même chose et ajoutait qu'il se sentait quand même un devoir envers la société pour déboucher sur des recherches intéressantes pour l'Homme, par exemple sur la fourmi d'Argentine. Cela me rappelle aussi un technicien informatique à l'université de Tours qui venait de me dépanner et à qui j'expliquais mes travaux sur les phtalates des fourmis et qui me dit qu'il était fier d'aider un chercheur qui peut aider l'humanité (oui, bon, c'est exagéré mais cela fait plaisir). Valérie Masson-Delmotte (coprésidente du GIEC) déclare : "Je suis payée par les impôts des gens. J'ai le sentiment de devoir partager les connaissances produites grâce à cela." (Guarric 2020).

« Tu penses que ton travail d’université peut servir à quelqu’un à quelque chose, tu appelles cela des recherches. » « J’ai prévu de te demander pourquoi le mot docteur dans tes études. Je ne vois pas bien ce qu’on peut soigner à l’université, à part soigner des cerveaux qui pensent déjà trop.» Paul Bedel et Catherine Boivin "Nos vaches sont jolies parce qu'elles mangent des fleurs" (Pocket 2017, p. 28).

Selon Philippe Grandcolas dans le Monde du 8 avril 2020 :

Je suis de plus en plus convaincu que la science n'est pas éternelle, il faut douter et savoir se remettre en question. Sylla de Saint Pierre dans son livre "Dans le secret des abeilles" écrit : "lorsque plusieurs grands esprits scientifiques se sont emparés d'un même sujet, y ont travaillé avec acharnement et en tirent des conclusions diamétralement opposées. Je me laisse guider par mes convictions et mes intuitions."

Voir
- Chauvin Rémy - Dieu des fourmis Dieu des étoiles. Le Pré aux Clercs 1988, 250 pages.
- Cudennec-Rio, V. (2022) Quelle est cette super-fourmi qui pourrait en pincer pour la Bretagne ? letelegramme.fr 9 mai 2022
-
Guarric, A. (2020). Savants ou militants ? Les chercheurs face à la crise écologique. Le Monde Science et Médecine 11 mars 2020. p. 1, 4-5. Pdf
- Lenoir, A. (1979). Le comportement alimentaire et la division du travail chez la fourmi
Lasius niger. Bulletin Biologique de la France et de la Belgique 113: 79-314. Pdf
- Lenoir A. (1998) – Les fourmis. Dans « Si les lions pouvaient parler – Essais sur la condition animale », Sous la direction de Boris Cyrulnik, Quarto, Gallimard, 389-401. Pdf