Néonicotinoïdes (néonics)
Mis à jour le 14-Mar-2023
Néonicotinoïdes selon Seguei dans Le Monde du 20 novembre 2021 :
Les néonicotinoïdes (Imidaclopride, le premier découvert en 1985 = gaucho, ses métabolites encore plus toxiques, thiaclopride, thiaméthoxane = cruiser et son métabolite la clothianidine = poncho, acétamipride..) ont été introduits comme insecticides dans les années 90 et leur utilisation a explosé dans les années 2000.
Ils agissent sur le système nerveux central des insectes en bloquant les récepteurs nicotiniques de l'acétylcholine (nAChRs), y compris chez les mammifères. Ils représentent en 2016 plus de 40% du marché mondial des insecticides agricoles, surtout sur les graines, mais seulement 5% est intégré dans les plantes. Ils sont hélas peu biodégradables, donc rémanents et persistent dans tous les environnements, les aliments. La disparition de 30% des oiseaux des champs en France en 15 ans semble due en partie aux néonicotinoïdes sur les semences, soit par ingestion directe soit par la disparition des insectes (Foucart 2018b). Les apiculteurs ont constaté très vite que les insecticides néonicotinoïdes ont des effets sur la mortalité des abeilles, et le syndrome d'effondrement des colonies (CCD). Yves Leconte déclarait au colloque de la Section Française sur les insectes sociaux à Villetaneuse en août 2013 que le gaucho a été introduit en France en 1993 et que le déclin des abeilles a par hasard commencé en 1995... Evidemment ceci est contesté par les firmes agrochimiques. Cette fois, enfin, on a un énorme travail de suivi des populations de 62 espèces d'abeilles sauvages (par exemple halictes, osmies) de 1994 à 2011 en Grande-Bretagne. Plus aucun doute : les populations de ces abeilles déclinent depuis l'utilisation des néonicotinoïdes sur le colza (Woodcock et al 2016). Voir l'article de Martine Valo (Le Monde 18 août 2016). Curieusement cet article important n'a pas été repris dans les autres journaux (période de vacances ?). Le journal du CNRS fait aussi le point sur cette question et sur le rôle des néonicotinoïdes (Calloce 2016, voir citation plus bas). Wood et Goulson ont fait le bilan des travaux sur les risques des néonocotinoïdes depuis 2013. Tout confirme les effets sur les abeilles et les bourdons mais aussi sur de nombreux autres invertébrés comme les osmies ou les andrènes et les vertébrés comme des oiseaux (Wood et Goulson 2017). Les poissons sont aussi victimes des néonicotinoïdes comme cela vient d'être constaté dans les plantations de riz au Japon (Foucart 2019b). Les insectides interdits en France comme l'imidaclopride et le diaméthoxane se retrouvent en Afrique où ils tuent les abeilles sauvages et les abeilles domestiques.
Néonicotinoïdes : le bilan complet par l'easac (European Academies Science advisory Council). Les derniers travaux, les effets, comment réduire leur utilisation.. Pdf
Voir l'interview d'Yves Le Conte (INRA Avignon, grand connaisseur des abeilles) dans La Recherche (Robert 2019). Il parle des travaux de Mickaël Henry (et al 2012) sur les effets du thiaméthoxane (cruiser) à doses subléthales. Les abeilles sont désorientées et se perdent.. L'effet cocktail entre Nosema et pesticides est aussi présenté. Dans la série des Epingles d'Alain Fraval le n°1286 (novembre) parle des effets des néonicotinoïdes sur le sommeil des abeilles. En effet, à des doses trouvées dans la nature, ils perturbent leur horloge biologique. L'abeille devient insomniaque et ne mémorise plus les trajets (Tackenberg et al 2020). Voir le texte
Selon Philippe Grandcolas dans le Monde du 8 avril 2020 :
L'EFSA vient de classer 3 de ces substances (imidaclopride, thiaméthoxane et clothianidine) comme représentant un risque pour les abeilles (Foucart 2018a) et l'Europe les a interdits en avril 2018 (Foucart 2018c). Et comble de l'ironie, les bourdons deviennent acros au thiaméthoxane et en consomment plus (Arce et al 2018). Le gouvernement autorise à nouveau des néonicotinoïdes "tueur d'abeilles". Eh oui.. mais uniquement sur la betterave et jusqu'en 2023 ! (Foucart 2020).
En plus, ces molécules semblent avoir des effets néfastes sur le développement du cerveau humain selon Stéphane Foucart qui cite un article de revue, pourtant prudent, de Melissa Perry qui appelles les néonicotinoïdes "néonics" (Foucart 2017, Cimino et al 2017).
(dessin de Médiapart, 1er septembre 2016)
L'industrie chimique a toujours un tour d'avance, elle vient de réussir à obtenir l'autorisation d'un nouveau néonic, le sulfoxaflor.. (Foucart et Valo 2017) et on vient de démontrer qu'il est nocif pour les bourdons (Siviter et al 2018, voir Rosier 2018). Et aussi comment cela peut agir dans la colonie de bourdons Bombus impatiens où la reine exposée à de l'imidaclopride est moins active pour s'occuper des larves (Crall et al 2018, voir Morin 2018 et Raine 2018).
Néonicotinoïdes et fertilité des abeilles osmies. L'imidaclopride diminue la fécondité des reines d'osmies. Si elles sont exposées au stade larvaire elle baisse de20%, si l'exposition est double (larve + adulte) cela baisse de 50%. On le savait mais c'est une belle expérience réalisée en Californie (Stuligross et Williams 2021, voir Foucart 2021).
Les néonicotinoïdes (surtout acétamipride, thiamethoxan et imidaclopride tous interdits en France depuis sept 2018, sauf une dérogation pour l'acétamipride jusqu'en 2020) sont détectés dans 98% des miels en Chine, avec des doses toxiques pour les abeilles. Mais, ouf, pas dangereuses pour les humains!! (Han et al 2022).
Oui, même le miellat des pucerons est empoisonné par les néonicotinoïdes (thiametoxame et d’imidaclopride). On pouvait s'en douter.. Une raison de plus pour interdire toutes ces substances !!! Les effets sur les fourmis, principales consommatrices de miellat, ne sont pas connus. (Calvo-Agudo et al 2019 - voir Le sirop est empoisonné).
A Chizé une étude a porté sur du pollen de colza. On y trouve hélas trois néonics (imidaclopride, thiamétoxane et clothianidine) qui sont pourtant interdits. On en trouve partout, même dans des fermes bio depuis 10 ans. Des suisses ont trouvé les mêmes résulats (Foucart 2019c).
Qu'en
est-il des fourmis ?
On a peu de données mais il suffit de se promener dans un champ de maïs,
de colza ou de tournesol pour constater qu'il n'y a plus aucune fourmi.
- Les fourmis champignonnistes sont souvent traitées avec de l'imidaclopride.
Chez Acromyrmex subterraneus les doses les plus faibles induisent une
augmentation de toilettage (Galvanho et al 2013). Chez Atta sexdens
la mortalité apparait à 10ng / fourmi (Santos et al. 2007).
- En Nouvelle-Zélande, la fourmi
d'Argentine fait disparaître les Monomorium antarcticum locales.
L'imidaclopride abaisse l'agressivité des Monomorium et au contraire
augmente celle des Argentines, ce qui augmente leur chance de se répandre
(Barbieri et al 2013, voir Bossy 2013).
- Il y a bien sûr des travaux sur la fourmi
de feu à des doses subléthales d'imidaclopride mais sans grande
efficacité, cela diminue la fécondité des reines (Wang
et al 2015a,b).
- Les effets des néonicotinoïdes sur les fourmis. Il fallait s'y
attendre. On pensait que les fourmis avaient un système de détoxification
très efficace. Chez Lasius niger, le thiométhoxane, à
des taux que l'on trouve dans la nature, n'effecte pas la mortalité des
reines fondatrices, elles ont une détoxification plus forte que celles
des ouvrières, mais la taille de la colonie à 64 semaines est
affectée. Cela montre l'existance de dommages irréparables dans
les écosystèmes (Schläppi et Straub 2020, voir arcinfo 2020).
On avait déjà montré les effets des phtalates sur ces mêmes
fourmis (Cuvillier-Hot et al 2014).
- Pour lutter contre un coléoptère qui transmet des nématodes
du pin au Japon on traite avec du thiaclopride, un néonicotinoïde,
qui affecte aussi indirectement les Camponotus japonicus (Jung et al
2018).
Voir
- Arcinfo (2020) Biodiversité: les fourmis sont aussi victimes des insecticides.
arcinfo.ch
1 Juillet 2020.
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Le
journal du CNRS : "Dès les années 1990,
les soupçons des apiculteurs se portent sur une nouvelle classe d’insecticides
utilisés dans les cultures, les néonicotinoïdes. Ces molécules
mises au point dans les années 1980 sont de puissants neurotoxiques qui
agissent directement sur le système nerveux central des insectes ravageurs
de cultures. « À la différence des précédentes
générations de pesticides, les néonicotinoïdes ne
sont pas uniquement pulvérisés sur les plantes, mais peuvent enrober
directement les semences, explique Axel Decourtye, écotoxicologue et
directeur scientifique de l’Institut de l’abeille. Ce sont des insecticides
systémiques, qui se retrouvent dans tous les tissus de la plante, jusque
dans le pollen et le nectar des fleurs. Les effets sur les abeilles ne tardent
pas à être mis en évidence par les chercheurs : à
haute dose, les néonicotinoïdes provoquent la mort des abeilles
; à plus faible dose, ils affectent les capacités cognitives des
butineuses qui ne retrouvent plus le chemin de la ruche. »"