Fourmis envahissantes en Espagne

Alain Lenoir Mis à jour 27-Jui-2021     

Selon Marseille News du 25 juin 2021, la fourmi folle arrive en Espagne dans le port de Barcelone. L'article fait le bilan des invasives et des fourmis posant des problèmes.
Espadaler, X., C. Pradera and R. Vila (2020). Lepisiota melas (Emery), una hormiga exotica mas para la Peninsula Iberica y dos adiciones a las hormiga de Cataluna (Hymenoptera, Formicidae). Lepisiota melas Emery, a nex exotic ant for the Iberian peninsula and two additions to the ants of Catalonia. Iberomyrmex. 12: 16-25. Pdf

"La liste des espèces exotiques qui envahissent l’Espagne ne cesse de s’allonger. Les fourmis, par exemple, ont déjà un bon nombre d’espèces étrangères aux écosystèmes espagnols qui s’y sont installées depuis des années. C’est un nombre qui ne cesse de croître, puisqu’il est passé de quelques espèces de fourmis exotiques à plus d’une vingtaine, dont au moins sept peuvent causer des désagréments ou des dommages à d’autres espèces, aux écosystèmes et même aux personnes. En Espagne, environ 300 espèces de fourmis sont connues au total. L’une des dernières espèces de fourmis envahissantes implantées en Espagne est la « fourmi folle » (Paratrechina longicornis). Son processus d’expansion semble lent et irrégulier, mais il a fait un saut qualitatif avec son emplacement récent à Barcelone. La « fourmi folle » a été localisée par des scientifiques aux îles Canaries (1981 et 2007), aux îles Baléares (2006), à Almería (2000), à Córdoba (2013), à Malaga (2008), à Murcie (2012) et à Gibraltar ( 2007).
Trois scientifiques espagnols, Xavier Espadaler, Carlos Pradera et Roger Vila, ont publié un article dans le magazine Iberomyrmex, édité par l’Association ibérique de Mirmécologie, dans lequel la détection de la «fourmi folle» dans le port de Barcelone est confirmée tout au long de 2019 et 2020 lors des travaux de prévention des nuisibles dans les installations portuaires.
Non seulement cette espèce a été trouvée, mais aussi encore un autre qui n’avait jamais été cité nulle part dans la péninsule ibérique:
Lepisiota melas, tout aussi envahissant. Bien que cette dernière espèce soit considérée comme une véritable trouvaille par les experts, il est inquiétant qu’il y ait de plus en plus de villes espagnoles où l’on trouve la « fourmi folle ». En fait, en novembre dernier, il était également situé dans la région de l’Axarquía de Malaga, le deuxième endroit de cette province où il se trouve.
Les auteurs de l’étude soulignent que le port de Barcelone est un point favorable pour l’entrée d’espèces exotiques en Espagne, car elles sont accidentellement transportées par des navires et des marchandises.
Les experts expliquent pourquoi cette espèce est problématique. C’est un Fourmi opportuniste, prédatrice et charognarde, qui se nourrit d’insectes vivants ou morts, de miellat, de graines ou de fruits.
Pour cette raison, il envahit également les maisons, à la recherche de restes de nourriture. C’est une fourmi très adaptable, car elle vit à la fois dans des environnements secs et humides, bien qu’elle préfère les environnements chauds. Leurs nids, difficiles à localiser, se trouvent souvent dans des murs ou des crevasses murales, sous des pierres ou dans d’autres constructions.
Le pays d’origine de l’espèce n’est pas connu et, bien que le genre
Paratrechina
provienne des régions tropicales d’Asie et d’Océanie, certains auteurs estiment que son lieu d’origine est le Sénégal.
Comme pour les autres espèces envahissantes, son introduction en Espagne doit avoir été accidentelle, par le commerce et le transport de marchandises. En Espagne, il était situé pour la première fois dans le port d’Almería. Son impact environnemental est qu’elle parvient à occuper les territoires d’autres fourmis indigènes, ainsi que d’autres invertébrés.

Il a aussi un impact économique, puisque s’il devient un ravageur agricole, il protège des insectes nuisibles aux cultures, comme les hémiptères suceurs, les cochenilles, les pucerons et autres, qu’il contribue à propager. Le contrôle de leurs populations est réalisé grâce à l’utilisation d’appâts toxiques spécifiques. L’entreprise spécialisée dans la lutte antiparasitaire Anticimex propose la liste suivante d’espèces de fourmis, exotiques et indigènes, qui peuvent être nuisibles en Espagne.
Autres espèces exotiques qui causent des dommages ou des nuisances en Espagne :
1. Linepithema humile (fourmi argentine). Originaire d’Amérique du Sud. Il est introduit dans les maisons en grand nombre. Dans certaines régions, comme le littoral méditerranéen, c’est un ravageur très persistant.
2. Lasius négligé. Originaire de Turquie ou d’Asie Mineure. Présent en Catalogne et à Ténérife. Dans certaines localités, il pénètre dans les maisons, causant de graves dommages en raison de son attirance pour les éléments électriques tels que les prises ou les boîtiers de connexion.
3. Monomorium pharaonis (fourmi pharaon). Originaire des régions tropicales d’Asie. Bien qu’il s’agisse d’une espèce envahissante largement répandue dans le monde, sa présence dans la péninsule ibérique est rare et peu commune.
4. Tapinome mélanocéphale (fourmi fantôme). Originaire des régions tropicales humides. Comme pour la fourmi pharaon, les occurrences de cette espèce en Espagne sont très rares et sporadiques.
5. Monomorium carbonarium. Originaire de Madère. En 2013, sa présence a été détectée dans une maison à Castelldefels (Barcelone). Sa présence est très rare et sporadique en Espagne.
6. Pheidole mégacéphale (Fourmi lionne). Espèce envahissante originaire d’Afrique tropicale. Il n’a été trouvé qu’occasionnellement dans les îles Canaries.
7. Hypoponera punctatissima (la fourmi de Roger). Espèce exotique originaire d’Afrique. Très rare en Espagne, où sa présence est plutôt sporadique. Cité au centre, au sud et au nord de la Péninsule.
Espèces indigènes causant des dommages ou des nuisances en Espagne :
1. Pheidole pallidula. Ils entrent généralement dans les maisons à la recherche de nourriture en grand nombre. Fréquent surtout dans la région méditerranéenne.
2. Crematogaster scutelaris. C’est un grand ravageur dans les forêts de chênes-lièges car il niche dans l’écorce de liège. Son introduction dans les bâtiments n’est pas très fréquente, mais on l’a vu nicher dans les maisons à certaines occasions.
3. Tapinoma nigerrimum. Il ne pénètre généralement pas dans les maisons, mais c’est un ravageur important dans les jardins, les terrasses et les parcs.
4. Lasius niger / Lasius grandis. Ce n’est pas un problème dans les maisons, mais c’est une nuisance dans les jardins en raison de son penchant pour les sécrétions sucrées des cochenilles, aleurodes, pucerons et autres ravageurs, qui voient leurs populations augmenter grâce à la protection qu’elles reçoivent des fourmis.
5. Plagiolepis pygmaea. Ce n’est pas un problème dans les maisons, mais c’est une nuisance dans les jardins et les terrasses.
6. Tetramorium caespitum (Fourmi du trottoir). Ils n’entrent généralement pas en grand nombre dans les maisons. Ils sont un problème dans les terrasses ou les jardins car ils peuvent nicher sur les trottoirs, les trottoirs ou les chemins cimentés."

Le graphique montre bien l'accroissement spectaculaire des espèces invasives en Espagne depuis les années 1970.

Remarques. En fait l'article parle surtout de Lepisiota melas (= Acantholepis frauenfeldi var melas), qui a envahi le port de Barcelone et forme une super-colonie (Pdf). C'est une fourmi de Grèce, Iran et Turquie. Voir une vidéo sur la fourmi dans le port.

La fourmi folle est ici la fourmi folle noire (Paratrechina longicornis), elle n'a été trouvée qu'une fois dans le port ! Le Lasius "négligé" est Lasius neglectus. La fourmi argentine est la fourmi d'Argentine (hormiga argentina en espagnol). La fourmi Pheidole mégacéphale (Fourmi lionne) est Pheidole megacephala, fourmi à grosse tête, fourmi lionne est sans doute une invention de l'auteur, à oublier. Hypoponera punctatissima est appelée la fourmi de Roger.. peut-être parce que c'est Roger qui l'a décrite en 1859 et en espagnol c'est la hormiga de Roger.