Cancer     

Alain Lenoir mis à jour 03-Avr-2022

Dans la communication dans les systèmes biologiques, comment savoir si un signal est honnête ou frauduleux ? Les auteurs parlent de la dégradation des signaux intercellulaires dans le cancer qu'ils comparent à une forme de corruption (Bukkuri et Adler 2021). Un article original et difficile à lire... Ils citent notre article de l'Annual Review Entomol (Lenoir et al 2001).

Hasard et cancer. En 2015, un article de la célèbre revue Science (Tomasetti et Vogelstein 2015) expliquait que la déclenchement d'un cancer était du à "la faute à pas de chance" pour les deux tiers, relevant de mutations aléatoires (Foucart 2015, Santi et Morin 2015). Cet article était déjà très discuté par le cancérologue Fabien Calvo ou Annie Thébaud-Mony. Les mêmes auteurs reviennent à la charge avec d'autres données qui semblent confirmer ce fait (Tomasetti et al 2017). De qui se moquent-ils ? Comme le dit Hervé Morin dans Le Monde du 25 mars 2017 "L'industrie va adorer ça, mais les prémisses de ces travaux sont fausses". Quand on voit l'explosion actuelles de cancers liés à l'environnement, on ne peut dire que c'est le hasard...

Toujours plus de cancers et de bénéfices des grands groupes pharmaceutiques. 10 millions de morts du cancer dans le monde en 2021 (soir 1 décès sur 6). Il suffit de regarder autour de nous et de voir tous ces jeunes de la cinquantaine touchés de cancers. Et bien sûr on ne parle pas des causes alors qu'on est envahis de pesticides et perturbateurs endocriniens (Chaffin 2021).

Tous les travaux confirmant bien que les pesticides augmentent le risque de cancers. C'est ainsi que manger bio réduit les risques de cancers de 25% pour les gros consommateurs. Les lymphomes font partie des cancers surreprésentés chez les agriculteurs exposés aux pesticides.. (Foucart et Santi 2018, Foucart 2018, Abdun 2019). Ce fait est bien confirmé par des médecins (Zeitoun 2018).

Un appel de politiques et de médecins a été lancé pour mieux prendre en compte les perturbateurs endocriniens comme le BPA, des phtalates, des pesticides, la dioxine dans les facteurs de risque de certains cancers. Un exemple : le DDT interdit depuis 50 ans provoque encore 5 fois plus de cancers du sein chez les mères si elles ont été exposées avant la puberté.
Bapt, G., A. Cicollela, A. Feltz, A. Soto and S. Anne (2019). La santé environnemenatle, sous-estimée dans la lutte contre certains cancers. Le Monde Science & Médecine 13 novembre 2à19. p. 7. Pdf

         

Stéphane Foucart dans sa chronique du Monde, du 25-26 avril 2021, à propos de l'approche "One Health" parle des effets à long terme du DDT : (voir épigénétique)
"Dans une étude publiée le 14 avril dans la revue Cancer Epidemietogy: Biomarkers Prevention et passée inaperçue en France, Mme Cotin et ses coauteurs sont parvenus à établir une association entre l'exposition au DDT (un célèbre pesticide), dans les années 1960, de femmes californiennes et la susceptibilité au cancer du sein de leurs petites-filles - des jeunes femmes d'aujourd'hui. En 2015, la même équipe avait déjà montré que les filles dont les mères appartenaient au quart de la population la plus exposée au DDT avaient, autour de la cinquantaine, un risque presque quadruplé de cancer du sein, par rapport à celles dont les mères avaient été le moins exposées.
Cette fois, en examinant les filles des filles de ces femmes californiennes exposées au DDT il y a six décennies, les mêmes auteurs suggèrent la persistance d'une prédisposition au risque de cancer du sein celles dont les grand-mères avaient les taux de DDT les plus élevés ont un risque doublé d'obésité et de puberté précoce. Deux facteurs de risque reconnus pour le carcinome mammaire. Bien sûr, la causalité n'est jamais démontrée par une étude observationnelle isolée, mais ces travaux sont cohérents avec les conclusions de nombreux autres. S'agissant d'une maladie qui touche une femme sur huit à une femme sur sept au cours de sa vie, ils pourraient revêtir une importance considérable en termes de santé publique.
Si l'histoire du DDT illustre si bien le fameux "One E-lealth", c'est que la bataille contre ce pesticide - interdit en 1972 aux Etats-Unis - a d'abord été celle des environnementalistes, plutôt que celle des autorités sanitaires et des médecins.. Jusqu'à la fin des années 1970 et même au-delà, les possibles effets délétères du produit sur les humains sont demeurés controversés. En revanche, ses dégâts sur la faune sauvage - en particulier les oiseaux - étaient eux, sans équivoque depuis les années 1950.
Mais les oiseaux, qui s'en souciait ? En 1962, dans son célèbre livre Printemps silencieux, la biologiste Rachel Carson a été la première à alerter publiquement sur le sujet. En dépit de la rigueur de son magnum opus, elle fut (et demeure) moquée et dénigrée, raillée pour sa sensiblerie » et son "hystérie" écologiste. En réalité, Rachel Carson ne faisait qu'appliquer les principes de l'approche "One Health", cinquante ans avant que cela ne devienne un élément de langage à la mode. L'environnementalisme d'hier était, en somme, un engagement pour la santé publique d'aujourd'hui. Il n'est pas certain que ceux qui enfourchent ces jours-ci ce cheval de bataille réincarné en slogan politique en aient vraiment conscience.
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Bukkuri (et al 2021) : un article original et difficile à lire... Dans la communication dans les systèmes biologiques, comment savoir si un signal est honnête ou frauduleux ? Les auteurs parlent de la dégradation des signaux intercellulaires dans le cancer qu'ils comparent à une forme de corruption (Bukkuri et Adler 2021). Ils citent notre article de l'Annual Review Entomol (Lenoir et al 2001).

Selon Le Journal d'ici (18 juin 2021) : Dossier : Le venin de fourmi, une piste prometteuse contre le cancer (Lien)
"L'équipe du laboratoire de biochimie de l'université Champollion [Albi] se lance un défi ambitieux : prouver les effets thérapeutiques du venin de fourmis sur les cellules cancéreuses." "Arnaud Billet et Michel Treilhou espèrent déposer un brevet à l'issue de leurs recherches sur le venin de fourmi." Hélas accès payant.. Voir Venins

Baptiste Piqueret, du LEEC (Villetaneuse) a  fait sa thèse sur la détection du cancer humain par les fourmis.

Medecine man. Film de John Mc Tiernan (1992) met en scène un botaniste qui cherche à extraire un médicament contre le cancer d'une plante de la forêt tropicale. La molécule n'est en fait pas produite par la plante mais par les fourmis qui vivent en association avec elle.

Voir
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Abdun, E. (2019). Bio. Il protège vraiment du cancer. Science & Vie n° 1217, Février 2019: p. 30-40.
- Bukkuri, A. and F. R. Adler (2021). Viewing Cancer Through the Lens of Corruption: Using Behavioral Ecology to Understand Cancer. Frontiers in Ecology and Evolution 9. doi: 10.3389/fevo.2021.678533. Pdf
- Calvo, F. (2015). Cancer et hasard, gare aux dérives interprétatives. Le Monde Science et Médecine 14 janvier. p. 8.
- Chaffin, Z. (2021). La cancer, premier marché des Big Pharma. Le Monde. 18 septembre 2021. p.15.
- Foucart, S. (2015). Méfiez-vous du hasard. Le Monde 14 janvier. p. 25.
- Foucart, S. (2018). Le bio, la santé et la science. Le Monde 28-29 octobre 2018.
- Foucart, S. and P. Santi (2018). Manger bio réduit les risques de cancer. Le Monde 24 octobre 2018. p. 8.
- Foucart, S. (2021). « One Health » à toutes les sauces Le Monde. 25-26 avril 2021. p.29. (voir le pdf)
- Lenoir, A., P. D'Ettorre, C. Errard and A. Hefetz (2001). Chemical ecology and social parasitism in ants. Annual Review of Entomology 46: 573-599. Pdf
- Morin, H. (2017). Cancer : le débat sur le rôle du hasard est relancé. Le Monde Samedi 25 mars. p. 7.
- Piqueret, B., F. Mechta-Grigoriou, B. Bourachot, J.-C. Sandoz and P. d’ Ettorre (2019). Ants are able to detect the odour of cancer cells. Colloque UIEIS Avignon 28-30 août 2019: p.35. Pdf
- Piqueret, B., B. Bourachot, C. Leroy, P. Devienne, F. Mechta-Grigoriou, P. d’Ettorre and J.-C. Sandoz (2022). Ants detect cancer cells through volatile organic compounds. iScience 25(3). doi: 10.1016/j.isci.2022.103959. Pdf
- Santi, P. and H. Morin (2015). Rôle du hasard dans le cancer : la polémique rebondit. Le Monde Vendredi 18 décembre. p. 6.
- Thébaud-Mony, A. (2015). Non, le cancer n'est pas le fruit du hasard ! Le Monde 7 janvier. p. 12.
- Tomasetti, C. and B. Vogelstein (2015). Variation in cancer risk among tissues can be explained by the number of stem cell divisions. Science 347(6217): 78-81. 10.1126/science.1260825
- Tomasetti, C., L. Li and B. Vogelstein (2017). Stem cell divisions, somatic mutations, cancer etiology, and cancer prevention. Science 355(6331): 1330-1334. 10.1126/science.aaf9011
- Zeitoun, J.-D. (2018). Consommer bio fait bien reculer le cancer. Le Monde 25-26 décembre 2018.