Les soldates ont un petit cerveau
Alain Lenoir Mis à jour 30-Mar-2022
par Alain Fraval. Épingles 1109 (octobre 2018)
Dans une société,
les tâches attribuées à chacun peuvent fortement différer
entre les groupes. Les morphologies sont adaptées, mais leurs anatomies
? Les soldats sont grands et costauds mais comparées à d’autres,
leur registre comportemental pauvre semble demander moins de capacités
intellectuelles. Ont-ils pour autant des cerveaux réduits ? La nature
ne peut donner tous les atouts à tout le monde, elle distribue ses investissements
limités selon ce qui est le mieux pour ladite société et
le tissu nerveux est particulièrement coûteux à fabriquer.
La réponse vient d’être trouvée par une équipe
basée à l’université Drexel (Pennsylvanie, États-Unis),
étudiant les fourmis légionnaires (nomades) du genre Eciton
(Hym. Dorylinés). Chez celles-ci, les différences morphologiques
entre les castes d’ouvrières sont particulièrement marquées.
Les soldates, ouvrières très spécialisées, de grande
taille et aux mandibules acérées en faucille, ne sont capables
que d’une chose : attaquer et tuer les vertébrés croqueurs
de fourmis. C’est aux autres ouvrières que reviennent le remorquage
du cadavre et son dépeçage ; elles sont nourries par leurs consoeurs.
Inclus dans la résine, les cerveaux ont été mesurés
et leurs tailles, rapportées à celle de leur propriétaire,
sont effectivement moindres. De plus les lobes antennaires, ainsi que les corps
pédonculés (siège de l’intégration, de la
coordination, de la mémoire…), sont relativement moins développés
que chez les travailleuses. Les lobes optiques ne sont pas réduits, suggérant
que les soldates ont quand même besoin de voir ce qu’elles font.
- O’Donnell, S., S. Bulova, M. Barrett and C. von Beeren (2018). Brain investment under colony-level selection: soldier specialization in Eciton army ants (Formicidae: Dorylinae). BMC Zoology 3(1): 3. 10.1186/s40850-018-0028-3. Article source (gratuit, en anglais)