Gabriel Debout (1976 - 2010)
Alain Lenoir Mis à jour 19-Déc-2021
Thèse en 2003 sous la direction de Doyle McKey à Montpellier : Parasite et mutualisme de protection : le cas de "Cataulacus mckeyi", fourmi symbiotique de "Leonardoxa africana africana". Résumé.
Hommage
à Gabriel Debout
Par
SFé, Nov 25, 2010
Nous avons appris avec une profonde tristesse la disparition accidentelle de
Gabriel Debout le 2 octobre dernier. Gabriel était un jeune chercheur
de talent. Après une formation initiale à l’Ecole Normale
Supérieure de Lyon, il effectua sa thèse à Montpellier
sur des modèles de plantes à fourmis avec Doyle McKey avant de
rejoindre Norwich en Angleterre pour poursuivre ces recherches en collaboration
avec Doug Yu et Brent Emerson de l’University of East-Anglia. Il aborda
ainsi diverses facettes de l’écologie, de l’architecture
génétique, des stratégies de reproduction et de l’évolution
de fourmis africaines (Cataulacus mckeyi) et sud-américaines
(Allomerus octoarticulatus) associées à des plantes myrmécophytes
(respectivement Leonardoxa africana et Cordia nodosa).
Gabriel Debout, Pyrénées-Orientales, été 2010
Ses travaux
montrèrent, de manière remarquable, comment deux traditions conceptuelles
longtemps étudiées séparément, la coexistence d’espèces
dans les communautés écologiques et la stabilité évolutive
des mutualismes, pouvaient être réunies au profit des deux domaines.
Il rejoignit ensuite l’Université Libre de Bruxelles, où
il s’intéressa avec Olivier Hardy aux questions de phylogéographie
et de flux de gènes chez un arbre d’Afrique centrale (Distemonanthus
benthamianus), tout en continuant des études de génétique
des populations sur les fourmis, notamment Formica rufa (avec Serge
Aron). Depuis 2009, il avait rejoint le laboratoire Evolution & Diversité
Biologique à l’Université Paul-Sabatier de Toulouse où
il développait de nouveaux projets sur l’évolution des métacommunautés
d’insectes en interaction avec la plante Antirrhinum majus (avec
Benoît Pujol, Jérôme Chave et Christophe Thébaud).
Il préparait activement sa candidature au concours CNRS sur ce thème.
Gabriel réunissait un vif intérêt pour la théorie
et une passion naturaliste. Dans la meilleure tradition du naturaliste savant,
il avait produit des travaux sur des questions fondamentales de l’Evolution
ainsi que des publications détaillées sur la biologie des organismes
qui, partout où il était passé, avaient suscité
sa curiosité. A côté de publications traitant des mécanismes
de coexistence d’espèces on trouve ainsi des travaux décrivant
l’histoire naturelle d’une mouche myrmécophage, espèce
non décrite au Cameroun, ou d’une population relictuelle de pie-grièches
dans les vignobles languedociens. Il approchait le monde vivant à la
fois par l’unité de la théorie et par la diversité
des histoires naturelles.
Ceux qui ont eu le privilège de travailler avec Gabriel garderont le
souvenir d’une personne généreuse et d’une gentillesse
infinie. Curieux tant des questions de science que de société,
très cultivé, toujours disponible pour donner un coup de main
ou fournir des conseils avisés, c’était un compagnon de
travail idéal. Il trouvait le temps de communiquer sa passion non seulement
aux étudiants et stagiaires mais aussi à une audience plus large
de non-scientifiques. Gabriel possédait une tranquillité de l’âme
qui semblait ne jamais céder à la colère, et un esprit
d’équipe infatigable. Toujours partant, toujours prêt, jamais
dépassé. Son aisance dans les relations avec les collègues
et les étudiants, et son goût immodéré pour la pédagogie,
faisaient de lui un membre d’équipe sollicité et respecté.
Gabriel était également une personne très modeste et d’une
grande honnêteté intellectuelle, pour laquelle la qualité
des publications avait infiniment plus d’importance que leur quantité.
Dans tous les laboratoires où il a séjourné, il a laissé
un héritage riche de connaissances acquises et de perspectives scientifiques
ouvertes mais aussi, et surtout, d’amitiés profondes. Sa disparition
prématurée, à 34 ans, laisse un vide immense pour tous
ceux qui ont travaillé à ses côtés, et plus encore
pour sa famille pour laquelle il avait réussi à ménager
un équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
Nous nous associons à la douleur de la famille et lui présentons
nos plus sincères condoléances.
Voir
- Debout G., Schatz B., Provost E., Renucci M., Tirard A., McKey D. (1985) -
LE SYNDROME DE POLYDOMIE CHEZ CATAULACUS MCKEYI, UNE FOURMI A PLANTE. Actes
Colloq Insectes Soc 15, 58-62. Pdf
- DEBOUT, G., E. PROVOST, M. RENUCCI, A. TIRARD, B. SCHATZ, & D. MCKEY.
(2003). Colony structure in a plant-ant: behavioural, chemical and genetic study
of polydomy in Cataulacus mckeyi (Myrmicinae). Oecologia 137 : 195-204.
- Debout, G., B. Schatz, M. Elias and D. McKey (2007). Polydomy in ants: what
we know, what we think we know, and what remains to be done. Biological Journal
of the Linnean Society 90: 319-348.
- Dalecky, A., M. Renucci, A. Tirard, G. Debout, M. Roux, F. Kjellberg and E.
Provost (2007). Changes in composition of cuticular biochemicals of the facultatively
polygynous ant Petalomyrmex phylax during range expansion in Cameroon with respect
to social, spatial and genetic variation. Molecular Ecology 16: 3778-3791.