Comportement social et réponses immunitaires chez la fourmi Camponotus fellah : Implications de la bactérie endosymbiote Blochmannia
Thèse présentée par Danival De Souza, IRBI, Tours
19 mai 2008
RAPPORTEURS : M. Didier Bouchon,
Professeur, Université de Poitiers - Mme Claudie Doums, Maître
de Conférences, HDR, Université Paris VI
JURY : M. Didier Bouchon; Mme Claudie Doums; M. Jean-Michel Drezen; M. Dominique
Fresneau; M. Claudio Lazzari; M. Alain Lenoir
Résumé :
La vie en société présente des avantages écologiques
et évolutifs, mais augmente les risques de transmission de pathogènes.
Pour faire face à ce problème, les insectes sociaux ont développé
plusieurs mécanismes de défenses comportementales et physiologiques,
et en plus utilisé la protection fournie par des organismes tiers. C'est
ainsi que des abeilles et des fourmis se servent de substances antimicrobiennes
d'origine végétale ou des fourmis possèdent des bactéries
productrices d'antibiotiques. La fourmi est un insecte qui, par définition,
ne peut vivre que dans sa société avec des congénères
avec lesquels elle entretient des relations nombreuses comme des léchages
interindividuels et des échanges en bouche à bouche (appelés
trophallaxies). Dans la première partie de la thèse, nous avons
étudié les altérations comportementales des ouvrières
de la fourmi Camponotus fellah après le déclenchement
d'une réaction immunitaire. Nous avons posé l'hypothèse
que si les relations sociales sont aussi coûteuses que les défenses
immunitaires physiologiques, l'individu devrait être confronté
à un choix : où investir son énergie ? Au contraire, suite
à une réaction immunitaire les fourmis ont augmenté leur
taux de trophallaxie et aucun signe d'isolement de l'ouvrière malade
ne fut observé. Ce résultat met en évidence l'importance
des relations sociales pour la guérison de l'individu et qui peuvent
même avoir une fonction prophylactique. La deuxième partie a été
consacrée à l'étude d'un endosymbiote primaire de C.
fellah, une bactérie du genre Blochmannia. Cet endosymbiote
a un rôle nutritif qui a été déjà montré
chez d'autres espèces de Camponotus. Nous avons envisagé
qu'il ait aussi d'autres fonctions comme : favoriser le système immunitaire
de la fourmi, favoriser le développement des nouvelles colonies et participer
à la formation de l'odeur coloniale. Nous avons d'abord décrit
cette nouvelle bactérie par des techniques de biologie moléculaire.
Ensuite, nous avons pu montrer qu'elle favorise la réponse immunitaire
des fourmis en augmentant l'encapsulation de particules étrangères.
Elle contribue à une plus grande production de larves, aboutissant à
une plus grande quantité d'ouvrières. Nous n'avons pas mis en
évidence de lien entre la quantité de bactéries et celle
d'hydrocarbures cuticulaires, bien que leur élimination par un antibiotique
entraînait une surproduction de ces hydrocarbures, probablement une réponse
liée au stress. Plus généralement, ces travaux montrent
de nouvelles fonctions des endosymbiotes, qui ont probablement contribué
au succès écologique de ce groupe de fourmis hautement diversifié
et très répandu.