Epingle1194 Rescapées du trou soviétique
par Alain Fraval, novembre 2019
En 2016, une Épingle
titrée « Au fond du trou
soviétique » alertait sur les conditions à peine vivables
d’un million d’ouvrières, emprisonnées dans un ancien
silo à missile nucléaire en Pologne, sans rien à manger,
sans espoir.
Après avoir extrait une poignée d’entre elles et vérifié
qu’elles s’entendaient bien avec leurs sœurs de la colonie
en surface (hydrocarbures cuticulaires reconnus), des entomologistes secourables
et surtout curieux leur ont offert un chemin vers la liberté. Ils ont
installé un poteau en bois entre le sol de la prison et le trou d’aération
au milieu du plafond en béton que nos Fourmis rousses des bois ne pouvaient
atteindre. À la suite de courageuses et surtout curieuses pionnières,
toutes les ouvrières sont sorties et ont rejoint le nid en dôme
de leur naissance.
En bas, les fourmis n’ont produit aucun couvain, l’effectif se maintenant
par la chute d’individus de la surface. Si exceptionnellement elles ont
pu se régaler d’une chauve-souris morte, leur ordinaire était
fait des cadavres de leurs consœurs, ce qu’atteste l’examen
des dépouilles entassées dans leur cimetière : toutes avaient
l’abdomen troué.
On corrigera donc la dernière phrase de l’Épingle de 2016
– elles sont finalement toutes parvenues à la surface, grâce
à un deus ex machina en forme d’entomologiste -, en saluant leur
ténacité et leur faculté de survivre dans des conditions
si terribles.
Photo : ouvrières de Formica polyctena, juste avant la pose
du poteau. Cliché Wojciech Stephan
À (re)lire : Les insectes sociaux et leurs morts, par Alain Fraval. Insectes
n° 194 (2019-3). En ligne ultérieurement.
NDLR : si le trou n’a pas été bouché, d’autres
(ou certaines des mêmes ?) se feront prendre… À suivre.