Biodiversité des fourmis

Alain Lenoir mis à jour 23-Mai-2023

Le nombre d'espèces de fourmis est à peu près bien connu, il faut aller sur antweb.org pour connaître le nombre. En juillet 2019 il était de 16 220 (Les guerres secrètes des fourmis, p.16). Selon Benoît Guénard, il y a une petite erreur sur l’estimation des espèces de fourmis car le nombre de 16 220 inclut également les espèces décrites en tant que fossiles ; le nombre actuel d'espèces vivantes étant aux alentours de 15 450 espèces et sous-espèces (mail du 15 nov 2019). En novembre on arrivait à 16 272, très peu de différence.

Biodiversité. Les fourmis d’Europe sont en train d’être décimées : quelles en sont les causes et les conséquences ? Par
Pierre-Hugo Maubant (Veridik, 23 avril 2023, merci Max Huber).
"Toutefois, il est indéniable que ce déclin est massif. Par exemple, en 2017, une grande étude internationale (Hallmann et al 2017) parlait du déclin de 76% des insectes (en nombre d’individus, pas d’espèces) en 27 ans en Europe. En l’espace d’une génération, c’est donc pas moins de trois quart des insectes qui ont disparu, ce qui est évidemment inédit et très inquiétant pour la communauté scientifique."

Pheidole drogon a été classée dans le Top 10 des nouvelles espèces découvertes en 2017 (Le Monde du 24 mai 2017). C'est la mode de donner des noms marquants, par exemple une crevette qui s'appelle "Pink Flyod" parce qu'elle émet des clics avec ses pinces.

Diverses fourmis parasites rares peuvent être considérées comme fragiles et en danger si leurs hôtes sont en diminution. C'est sans doute le cas de Formicoxenus nitidulus parasite des Formica du groupe rufa (Harkonen et Sorvari 2017). J'ai pu constater que certains nids de Formica du groupe rufa où je trouvais des Formicoxenus il y a quelques années en sont maintenant dépourvus.

Les Polyergus semblent être des fourmis fragiles sensibles aux pollutions. Christian Foin, myrmécologue amateur, m'écrit  "Tu seras peut être intéressé de savoir que certaines espèces de fourmis, je pense aux Polyergus suivent le même déclin que les abeilles. Il y avait il y a 30 ans un nid tous les 500m autour de chez moi [dans le Gers]. Les deux derniers que je connais sont à 15 et 30km. Les deux dans des endroits loin des cultures. J’ai vu les autres s’orpheliner un à un. Un dernière année avec l’élevage des seuls mâles. Il y en a surement d’autres mais difficiles à trouver loin des chemins. Egalement le milieu se transforme avec la disparition des moutons. Le reboisement spontané passant par les ronciers mais surtout avec la généralisation de la chimie sur tous les milieux ouverts. C’est plus rapide que toutes autres formes de travail." (mail 9 nov 2019). J'ai aussi observé la même chose près de chez moi à Azay-sur-Cher (près de Tours) où il y avait plusieurs colonies de Polyergus. Thibaud Monnin était venu les photographier pour le livre "Guide des fourmis de France" et elles ont toutes disparues. Les fourmis parasites semblent aussi être fragiles, c'est ainsi que Plagiolepis xene dans le sud de la Touraine a disparu, les coteaux calcaires exposés au sud où vivent les Plagiolepis pygmaea hôtes sont plus rares car il n'y a plus de moutons et la végétation remplit tout.

Les espèces de fourmis sont beaucoup plus nombreuses quand on va vers les tropiques. Par exemple sur des carrés en Guyane on trouve dans la litière 267 espèces différentes (9 plots de 0,12ha à 400, 600 et 800m asl) (Fichaux et al 2021).

La revue ti-science de Guyane a lancé en 2021 une étude sur la biodiversité des fourmis et champignons de Guyane pour les enfants.

Et sur le site du CNRS : Fourmis et champignons de Guyane. La biodiversité guyanaise, de la réalité au virtuel ! Avec des portraits de fourmis par Kamil Stajniak.

Pourquoi les fourmilières forment-elles une "Costa del Sol" miniature pour la biodiversité ? (Geo 2 avril 2023). Merci Max Huber. Les auteurs ont montré par exemple que "cinq espèces de plantes à fleurs se développaient de manière plus précoce au sommet des fourmilières – surtout celles de la fourmi rousse à tête étroite." (Formica exsecta). Ils parlent aussi de l'azuré des mouillères (Hansen et al 2023).
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Comparer avec un travail d'échantillonnage avec Jacques Delabie et Dominique Fresneau (2000) dans des chênaies à la périphérie du Bassin Parisien. "Malheureusement, je ne crois pas qu'on ait publié le reste des informations à l'époque. Au niveau de la litière de la forêt, en évitant les bords, on trouve toujours moins de dix espèces (plutôt six) dans les conditions d'utilisation des pièges de Winkler. Si on inclut des milieux un peu perturbés (clairières, bords, ...), cela ne doit pas dépasser la douzaine d'espèces" (Delabie et al 2000, mail du 10 février 2021).

La culture du maïs transgénique au Brésil ne semble pas affecter la faune des fourmis par rapport au maïs traditionnel. On trouve 145 espèces ! (de Assis et al 2018). Chez nous, dans le Béarn, il n'y a plus rien dans les champs de maïs, ni vers de terre ni fourmis... Je n'ai pas vu de champs de maïs bio...

Dans "A l'aube de la 6e extinction", de Bruno David (Livre de Poche, 2022) :
"D'année en année, nous nous habituons à voir un peu moins d'abeilles, de fourmis, à avoir un peu plus chaud, à ce que nos paysages changent." (p. 11-12).

Réf
- de Assis, V. C. B., P. G. Chagas, C. G. S. Marinho, M. A. M. Fadini, J. H. C. Delabie and S. M. Mendes (2018). Transgenic Bt maize does not affect the soil ant community. Pesquisa Agropecuária Brasileira 53: 152-162. doi: 10.1590/S0100-204X2018000200003.
- Delabie, J. H. C. C., S. and D. Fresneau (2000). Étude comparative de la saturation des communautés de fourmis de litière sous latitudes tropicale et tempérée. Actes Coll. Insect. Soc. 13: 71-75. Pdf
- Fichaux, M., J. Vleminckx, E. A. Courtois, J. H. C. Delabie, J. Galli, S. Tao, N. Labrière, J. Chave, C. Baraloto and J. Orivel (2021). Environmental determinants of leaf litter ant community composition along an elevational gradient. Biotropica 53(1): 97-109. doi: https://doi.org/10.1111/btp.12849.
- Hallmann, C. A., M. Sorg, E. Jongejans, H. Siepel, N. Hofland, H. Schwan, W. Stenmans, A. Müller, H. Sumser, T. Hörren, et al. (2017). More than 75 percent decline over 27 years in total flying insect biomass in protected areas. PLoS ONE 12(10): e0185809. 10.1371/journal.pone.0185809. Libre accès.
- Hansen, R. R., K. E. Nielsen, D. B. Byriel, C. Damgaard, M. T. Strandberg, I. K. Schmidt and J. Offenberg (2023). Ant mounds extend the duration of plant phenology events and enhance flowering success. Arthropod-Plant Interactions 17(2): 205-216. 10.1007/s11829-023-09946-z
- Härkönen, S. K. and J. Sorvari (2017). Effect of host species, host nest density and nest size on the occurrence of the shining guest ant Formicoxenus nitidulus (Hymenoptera: Formicidae). Journal of Insect Conservation: 1-9. 10.1007/s10841-017-9986-y